La nymphe borgne
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Urua, notre sainte ville migratrice, fut le berceau d'un crime atroce. Incarnez un personnage et tentez de découvrir les secrets d'une cité des cieux.
 
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 Tractes violets et parapluie rose

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Azalée

Azalée


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MessageSujet: Tractes violets et parapluie rose   Tractes violets et parapluie rose Icon_minitimeDim 2 Nov - 9:41

La coque se calait dans un nuage – duveteux – écaillé au vent d'une écume légère et dansante. Une danse ivre, fragmentée par les glaces, s'élevait ainsi sur les flancs vernis du bateau. Les longues traînées de nuages s'étalaient à perte de vue, traversées de halos intenses et chauds. Les parois avançaient, à travers la mer de cirrus impassibles. Aucune dépression n'était visible, le trajet serrait donc calme cette fois ci.

Malgré le cyclone de la veille, tout était propre sur la passerelle, d'une apparence flambant neuf. L'habituelle couleur fuchsia scintillait sous un soleil ordinairement lourd. Près de la voile, sur le filet couleur saintpaulia se reposait – avachi – Valentin. Le pied et le bras pendant, les paupières closes, un souffle profond, les dents récidivement serrées sur une petite branche de serpolet.

Emmanuel quant à lui, était assis sur une marche blanche, nervurée de rose clair, presque saumon. Il guettait impassiblement, camouflé jusqu'au visage par son uniforme noir ; à l'affut de tout, et de rien. Rien au monde ne semblait le distraire, ni l'odeur sucrée portée par les vents, ni les oiseaux volant majestueusement sous les courants.

Derrière, Valence et Vanda se cramponnaient aux rebords du bateau ; lesquels représentaient de magnifiques formes végétales sculptées en barreaux. Sa petite sœur observait – tout entière au vent, un ourson brun à la main – les avatars nuageux dont le vieil homme énumérait les propriétés.

Droit dans l'axe de la cabine, le violet prononcé d'une table rectangulaire et d'une chaise. La porte – au hublot en étoile – s'ouvre sèchement. Des pas claquent, réguliers. L'hermine glousse. La Belle Fatale s'arrête. Ticky se dresse un instant puis descend en spirale – le long de son bras – pour se réfugier vers la table. Le regard vagabond et sondeur, Azalée reprend sa courte marche vers la chaise, chargée d'un important paquet de feuilles violettes et parmes.

Les pieds de bois frôlent l'abomination du grincement ; elle s'assoie. Du haut de sa posture d'une symétrie colossale, ses yeux se posèrent sur une pile de papiers soigneusement tassés, retenue par une pièce d'améthyste.

Ces feuilles étaient des tractes, soigneusement codés. La bouteille ornée d'un hibiscus indiquait le bateau, la lune signifiait que le – possible – entretient devait se dérouler de nuit et le couteau qu'il s'agissait d'une proposition d'assassinat. La jeune femme les avait préparées avec conviction. Elle espérait bien se sentir d'utilité publique et envoyer une quelconque personne ad patres, sur commande, restait dans ses cordes.

On entendit tout juste la friction du papier contre la pierre. Dans un court instant, elle recevrait le jugement décisif, celui duquel elle s'appuierait bientôt pour coller ou bien bruler ces amas de fibres inanimées. Le tract était à présent plaqué sur la table, soutenu puissamment d'une main aérienne.


*Espérons*

- Ticky?

La boule de poils blancs se dressa un instant, tournant brièvement ses yeux profonds dans les prunelles d'Azalée. Ils n'avaient pas besoin de parler, et ce bien avant le sceau qui les unissait constamment. Le svelte animal comprenait bien l'ennui mortel qui s'était installé en elle. L'incapacité de venger son cœur l'avait enfermée dans une routine fatalement venimeuse.

Ses recherches ne pouvaient aboutir tant qu'elle serait rejetée et son tempérament excluait tout rabaissement – injuste – de sa propre personne. Travailler pour quelqu'un lui avait donc paru la meilleure option. Quant à la communauté pirate déjà existante, elle ne se sentait pas de force à essayer de s'y intégrer. Un nouvel échec aurait froissé son ego et impliqué une migraine.

La belle pirate se sentait – de même qu'amoindrit par la population uruane – légèrement affaiblie. Et ce même si elle ne le laissait paraître. Excepté son animal, seul Valentin devait le déceler. Ses longues années à l'aider dans l'éducation de sa sœur les avaient considérablement rapprochés.


*


Le gypaète se posa près du beau blond. On voyait à présent se profiler un port, à l'horizon. Peut-être pourrait-elle bientôt étaler ses tractes et briser cette monotonie atrocement parasite.

Le navire ne tanguait pas – ou peu – et c'était là une des particularité de naviguer parmi ces concentrés vaporeuses de gouttelettes stagnantes. Ça et la chaleur étouffante de la surface troposphérique à laquelle chacun devait s'accoutumer.

On aurait pu néanmoins s'y méprendre. Le crachin brumeux s'épaississait et les nuages se densifiaient à l'image de ces vagues impétueuses des mers liquidement acqueuses. Mais il y avait en cette nouvelle mer un charme inconnu des anciens pirates et navigateurs d'embruns. La hauteur sur les choses terrestres se matérialisait ici par le détachement.

Tout était si petit vu d'en haut. La navigation était devenu un rêve éveillé, émerveillé, sublimé. Voler avec les oiseaux. Se geler les mains d'une caresse nuageuse. Dominer le décors, les pirates. Surhommes. Bien sûr, si certaines coutumes étaient réputées cruelles, certaines étaient devenue immonde. Il y avait en effet une légère différence dans les chances de survies attribuées au châtiment de la planche. Car si certains arrivaient à en réchapper autrefois, il en était moins sur de nos jours.

Le bateau se cala. Les turbines photovoltaïques se stabilisèrent horizontalement. Le bateau était à bon port. Visiblement attristée, Vanda était partie dans sa chambre, suivie de Valence. Emmanuel n'avait pas bougé, fermement adossé entre une marche et son mur tangent.

La belle féline était toujours à son bureau de pleine passerelle. La posture d'une femme fatale, assise à son bureau., les jambe croisée, le dos dressé, le regard perçant . Droit devant, le paysage, coloré de senteurs sucrées et d'ambre. Le bois semblait lustré, brillant de tout son camaïeu. Le en avait quelque chose de troublant. Ça et le manque cruel de bateau – désillusion du rêve piratien – sans oublier le vide. Un océan aérien de bleu et de transparence prolongé à perte de vue vers la surface terrestre.

Peut-être y avait-il là une chance. Car si les bateaux pirates n'étaient pas nombreux, il y aurait une élite. Elle était là, toujours immobile et intense, songeant à une possible élite. La belle continuait, vaguant dans ses pensées, encore et toujours, ne pouvant concevoir l'échec, l'espace d'une longue réflexion. Tout semblait s'effacer mystérieusement. L'Hibiscus attendait, impassible et violet!
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